Jeudi 22 juillet prochain, le Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin propose une conférence richement illustrée intitulée « Les Dames d’Estouteville et le Cotentin de la Renaissance ».
Entrée au XVe siècle en possession de la famille d’Estouteville, l’antique baronnie de Bricquebec devint à la Renaissance le lieu de résidence privilégié de l’une des familles parmi les plus influentes du royaume de France. Le destin de Jean d’Estouteville, qui fut élevé à la cour de Moulins, participa aux guerres d’Italie et séjourna fréquemment dans les châteaux de la Loire, marque le début de cette apogée culturelle. Mais l’histoire de Bricquebec fut surtout marquée par l’activité de son épouse, Jacqueline, qui assura une régence de 33 années, puis par celle de sa fille Adrienne, première dame de compagnie de Catherine de Médicis, et enfin par celle de Marie de Bourbon, sa petite fille, qui vécut au temps des guerres de Religion. Résidant fréquemment dans leur demeure Cotentine ces dames y menaient un train de vie exceptionnel tout en administrant avec compétence les immenses possessions familiales. La faveur la duchesse d’Estouteville suffisait à faire la fortune des familles de la noblesse locale ; l’exemple de Jean de Ravalet, secrétaire particulier d’Adrienne, abbé de Hambye et bâtisseur du château de Tourlaville en offre l’exemple le plus notable. L’architecture des plus belles demeures de ce temps exprime encore avec éclat la puissante influence exercée en Cotentin par ces grandes figures de la Renaissance.
(Toute publicité indépendante de notre volonté)
Cette conférence se tiendra à Bricquebec, dans la salle de la gare (avenue de la gare)
et débutera à 18h30.
Les tarifs sont de 4 € pour les adultes, 1,50 € pour les étudiants. Gratuit pour les moins de 18 ans, les personnes sans emploi (intervenant : J. Deshayes).
Renseignements et réservations : Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin
Chasse au trésor au château de Bricquebec (4-10 ans), mercredi 21 juillet, 15h00.
Rendez-vous à l’Office de tourisme, place Sainte-Anne.
Enquête criminelle au château de Bricquebec (6-12 ans), mercredi 11 août, 15h00.
Rendez-vous à l’Office de tourisme, place Sainte-Anne.
VISITES DECOUVERTES DU CHATEAU(partenariat avec le service culturel de la ville) :
Visites découvertes de la forteresse médiévale : du lundi au vendredi à 15h et 16h30.
Rendez-vous à l’Office de tourisme, place Sainte-Anne.
Exposition permanente
« Histoire et territoire, la baronnie de Bricquebec au Moyen Âge »
L’exposition Histoire et territoire, la baronnie de Bricquebec au Moyen Âge permet de découvrir le fonctionnement de la seigneurie de Bricquebec, depuis le règne de Guillaume le Conquérant jusqu’à la fin du XVe siècle. La géographie des fiefs chevaliers, le développement des bourgs, l’exercice de la justice, la construction de moulins, l’exploitation des rivières et des forêts y sont évoqués et richement illustrés. En suivant ce parcours historique, il vous sera donné de percevoir, au-delà des hauts murs du château médiéval, l’emprise considérable de l’ancienne baronnie et le rôle déterminant qu’elle a exercé sur la formation des paysages environnants. Sa scénographie permet de mettre en valeur une très belle collection de statuaire médiévale, et d’animer agréablement le cadre architectural, si authentique, de la Tour de l’horloge.
Exposition visible dans le cadre des visites guidées quotidiennes,
ainsi que les lundis de 10h à 13h et les dimanches de 15h à 18h.
Dimanche 27 juin prochain, le Pays d'art et d'histoire du Clos du Cotentin propose une excursion à la découverte des trésors de l’architecture de la Renaissances des environs de Saint-Sauveur-le-Vicomte.
Loin de constituer une région isolée ou marginale, le Clos du Cotentin est marqué au XVIe siècle par une remarquable floraison architecturale. Nombre de manoirs et de demeures nobles adoptent le vocabulaire de la Renaissance et se mettent au diapason des plus récentes constructions royales. L’itinéraire proposé ce dimanche 27 juin permettra de découvrir trois édifices parmi les plus représentatifs de ce grand courant artistique. Tandis que la Cour de Rauville-la-Place permet de distinguer deux phases d’une évolution architecturale conduisant du Moyen-âge tardif à la Renaissance, la Cour de Reigneville-Bocage offre le plus bel exemple local de décor italianisant, inspiré des modèles gravés qui circulaient dans le royaume de France. A Sainte-Colombe, la façade du château montre une composition marquée par l’influence de l’aile Henri II du palais du Louvre.
Cette excursion thématique s’inscrit dans le cadre des commémorations de l’anniversaire de
Gilles de Gouberville (1521-1578), portées par le Comité Gilles de Gouberville.
L’itinéraire proposé, d'une durée d'environ 2h30 débutera à 15h, au départ du château de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Les déplacements se feront en véhicules individuels (visites en extérieur). Prévoir aussi un temps de marche...
Tarif = 4€ /adulte, 2€ /étudiant et personne sans emploi, gratuit aux moins de 18 ans.
Le port du masque et le respect de distances de sécurité seront sollicités
F. BUHOT, Le Pavillon et le tourillon de l'école des frères, 1884 (coll. Ville de Valognes)
En lien avec l’exposition temporaire « Dans les pas de Félix Buhot » présentée durant l’été 2021 par le service culturel de la ville de Valognes, le Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin propose, ce jeudi 24 juin, une conférence en salle consacrée à « Valognes et le Cotentin dans l’œuvre de Félix Buhot ».
Né à Valognes en 1847, Félix Buhot est demeuré sa vie durant fidèle au souvenir de sa ville natale, qu’il n’a cessé d’illustrer et de magnifier par son art. Connu en particulier pour ses illustrations des œuvres littéraires de Jules Barbey d’Aurevilly, il fut surtout un paysagiste d’atmosphère, nourrissant sa contemplation du réel par un imaginaire aux tonalités romantiques, voir « gothiques », dans le sens où une sombre et étrange inquiétude semble parcourir son œuvre de part en part, et la remplir de mystère.
Cette conférence sera animée par M. Bruno Centorame, historien de l’art, spécialiste du XIXe siècle. Auteur de plusieurs articles et publications consacrées à Félix Buhot, Bruno Centorame a en particulier contribué à la rédaction du catalogue de la rétrospective que le musée Thomas Henry de Cherbourg a consacré durant l’été 2016 à cet artiste majeur de la fin du XIXe siècle.
Cette conférence se tiendra à l’Hôtel Dieu de Valognes (rue de l’hôtel-Dieu), à partir de 18h30 précises.
Les tarifs sont de 4 € pour les adultes, 2 € pour les étudiants et les personnes sans emploi.
Ce mardi 15 juin, dans le cadre du cycle des visites « à l’ombre des clochers », le Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin vous propose de venir découvrir l’église Saint-Eloi et le manoir de Thurin, sur la commune de Lieusaint.
Peu d’églises du Cotentin présentent un substrat archéologique d’une richesse comparable à celle de Lieusaint. Outre la découverte d’un cercueil de l’antiquité tardive et d’autres vestiges de l’époque romaine, on y signale plusieurs sarcophages mérovingiens et une rare inscription funéraire du Xe siècle. L’église actuelle, soigneusement reconstruite au XVe siècle, abrite une belle statuaire médiévale et le cimetière qui l’environne recèle un très riche patrimoine funéraire.
Le manoir de Thurin se signale aux visiteurs par sa haute tour d’escalier circulaire et ses massives maçonneries de grès rouge. Bâti au XVe siècle, modifié et agrandi au fil des siècles, il fut jadis une dépendance de la lointaine seigneurie de Thury-Harcourt.
La visite débutera à 15h00. Rendez-vous à l’église de Lieusaint.
Tarif = 4€ /adulte, 2€ /étudiant et personne sans emploi, gratuit aux moins de 18 ans.
En raison des mesures sanitaires actuelles, la participation à la visite sera accessible sur inscription au
06 31 66 15 93 (heures de bureau).
Le port du masque
et le respect des distances de sécurité est obligatoire.
Le pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin propose, ce jeudi 27 mai à 18h30, une conférence consacrée aux« Illustrateurs des œuvres de Jules Barbey d’Aurevilly ».
Felix Buhot, étude pour illustration du roman Une vieille maitresse musée Th. Henry Cherbourg
Assurément, Jules Barbey d’Aurevilly figure au premier rang des romanciers français à avoir conquis de très nombreux illustrateurs. Le Valognais Félix Buhot (1847-1898), maître de l’eau-forte, très inspiré par les sites de son Cotentin natal, propices à la rêverie et à l’exaltation des sentiments, demeure sans doute le plus connu : Le Chevalier des Touches, L’Ensorcelée, Une Vieille maîtresse l’auront tour à tour séduit. Le Belge Félicien Rops (1833-1898) s’est attaché à exprimer le côté le plus sombre et le plus tourmenté des Diaboliques et apparaît très représentatif de cette ambiance « fin de siècle », ayant marqué le monde des arts et des lettres. L’Allemand Alastair relève également d’un certain « décadentisme » qu’il prolongea jusque dans l’entre-deux guerres. Quant à Alfred Kubin, artiste qu’une importante exposition rétrospective parisienne remit au premier plan il y a quelques années, il relève du temps où l’Empire Austro-Hongrois, à la charnière des XIXe et XXe siècles, connu une intense et exceptionnelle période de création ; son imagination débordante et tourmentée s’accorda à ravir à l’ambiance du recueil de nouvelles Les Diaboliques. De nos jours encore, de la part d’artistes cultivés épris de l’œuvre littéraire, perdure cette tradition de se mettre au service du Connétable des lettres ; citons ainsi les compositions originales de Marc Ollivier, Florence Burnouf, Christophe Rouil…
La conférence débutera à 18h30. Rendez-vous à l’hôtel-Dieu de Valognes, salle Paul Eluard.
Elle sera animée par M. Bruno CENTORAME, historien de l'art
Tarif = 4€ /adulte, 2€ /étudiant et personne sans emploi, gratuit aux moins de 18 ans.
En raison des mesures sanitaires actuelles, la participation à la conférence sera strictement limitée, c’est pourquoi il vous est demandé de vous inscrire au : 06 31 66 15 93
Le Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin reprend enfin ses activités et propose, ce dimanche 23 mai à 15h, une visite du manoir de Durécu, sur la commune de Bricquebec.
Comme nombre de belles demeures édifiées en Cotentin à la Renaissance, le manoir de Durécu a été construit par une famille de la petite bourgeoisie de robe, alors en pleine ascension. Son bâtisseur présumé, Jean Estricard, détenait au début du XVIIe siècle l’office d’avocat, de contrôleur du domaine et de lieutenant particulier au bailliage de la haute justice de la baronnie de Bricquebec. En 1772, la propriété est acquise par Georges Ambroise Lepoittevin, meunier du proche moulin de Gonneville, ancêtre direct du célèbre écrivain Guy de Maupassant.
L’ensemble se compose de quatre bâtiments principaux, parmi lesquels on identifie une grange, un ancien pressoir à cidre, un bâtiment d’étables et le logis. On y trouve aussi un terrain semblant correspondre à l’ancien jardin potager et, derrière la grange, le coursier d’un moulin disparu. Le logis, de petites dimensions, se signale en particulier par ses arcs de décharge en brique rouge, induisant un heureux effet de polychromie. En dépit de quelques modifications de façade au XVIIIe siècle Durécu est représentatif de l’habitat rural de la Renaissance tardive, occupant un échelon intermédiaire entre le manoir seigneurial et la simple maison de laboureur.
La visite débutera à 15h00. Rendez-vous place Ste-Anne (déplacement sur site en véhicule individuel)
Tarif = 4€ /adulte, 2€ /étudiant et personne sans emploi, gratuit aux moins de 18 ans.
(intervenant : Simon TASSET)
(toute publicité indépendante de notre volonté)
En raison des mesures sanitaires actuelles, la participation à la visite se fait uniquement sur inscription au préalable au 06 31 66 15 93 avant le vendredi 21 mai à midi.
Le port du masque et le respect des distances de sécurité sont obligatoires.
Essai d’enquête nautique sur le naufrage de la Blanche-Nef à Barfleur au XIIe siècle
Le naufrage de la Blanche-Nef, qui a provoqué la noyade de l’héritier de la couronne anglo-normande Guillaume Adelin, de ses compagnons et de l’équipage, est raconté par Orderic Vital et d’autres chroniqueurs contemporains des faits.
C’est Orderic Vital qui est le plus disert sur l’événement et qui donne des précisions que je vais exploiter pour essayer de le reconstituer. Les récits des autres chroniqueurs (Guillaume de Malmesbury, l’Abbé Suger) n’offrent peu ou pas de complément.
Dans cette enquête, la première chose à vérifier est la date,car les indications divergent. Guillaume de Malmesbury donne 1116, et on trouve 1120 dans la plupart des récits modernes.
Orderic Vital raconte l’événement dans le Livre XII partie II chapitre XII de l’Histoire de Normandie.
Pour la commodité de mon analyse, j’ai indexé de (1) à (20) les termes du récit auxquels je ferai référence.
1) L'an de l'incarnation du Seigneur 1119, …Gui, archevêque de Vienne, fut élu pape sous le nom de Calixte. (p.286-287)
(2) Au milieu d'octobre, le pape Calixte vint à Rheims, il tint un concile.
(3) Au mois de novembre, le pape Calixte vint en Normandie, et eut à Gisors avec Henri une entrevue concernant la paix.
(4) Le roi Henri, après tant de travaux, ayant parfaitement mis ordre à ses affaires en Normandie, résolut de repasser la mer.
(5) Une grande flotte ayant été équipée dans le port que l'on appelle Barfleur, le 7 des calendes de décembre, au commencement de la nuit, par un vent du sud, le Roi et sa suite s'embarquèrent.
(6) « J'ai pour votre service royal un vaisseau parfaitement équipé, que l'on appelle la Blanche-Nef » … « Je vous confie mes fils Guillaume et Richard » Les matelots furent comblés de joie; et se rendant agréables aux fils du Roi, ils lui demandèrent du vin,…trois muids, ils s'enivrèrent.
(7) Près de trois cents personnes,…cinquante rameurs habiles, ainsi qu'un équipage, les hommes seuls avec le trésor du Roi et les muids de vin remplissaient le vaisseau de Thomas.
(8) Les matelots… poussèrent le vaisseau avec une grande impétuosité sur les flots.
(9) Le flanc gauche de la Blanche-Nef toucha violemment sur un grand rocher que tous les jours le reflux met à nu, et qu'ensuite recouvre la marée montante. Deux planches ayant été enfoncées, le vaisseau fut, hélas! à l'improviste submergé.
(10) Deux hommes seuls se saisirent de la vergue qui soutenait la voile, et, y restant suspendus une grande partie de la nuit, ils attendirent qu'il leur vînt un secours quel qu'il fût.
(11) Alors la Lune était à son dix-neuvième jour dans le signe du Taureau: pendant près de neuf heures, elle éclaira le monde de ses rayons, et rendit la mer brillante aux yeux des navigateurs.
(12) Le pilote Thomas…éleva la tête au-dessus de l'eau, et voyant ceux qui se tenaient attachés à la vergue.
(13) Suspendus sur les flots, Bérold et Goisfred invoquaient Dieu.
(14) Le jeune Goisfred…retomba dans les flots.
15) Bérold... conserva la vie: le matin, ayant été recueilli par trois pêcheurs dans leur barque, il fut le seul qui gagna la terre.
(16) Ensuite, s'étant un peu remis, il raconta en détail ce triste événement aux curieux qui l'interrogèrent, et depuis vécut près de vingt ans en bonne santé.
(17) Ce prélat (Roger, évêque de Coutances) et beaucoup d'autres personnes, qui étaient encore réunies sur le rivage, le Roi lui-même et ses compagnons, qui étaient déjà loin en pleine mer, entendirent les horribles cris de détresse des naufragés; mais, ignorant la cause de ce bruit, ils restèrent dans l'inquiétude jusqu'au lendemain.
(18) Les habitans de la côte, ayant acquis la certitude de cet événement désastreux, traînèrent au rivage le vaisseau fracassé avec tout le trésor du Roi; tout ce qui était dans le bâtiment, à l'exception des hommes, fut trouvé en bon état. Ensuite, des hommes légers à la course, le 7 des calendes de décembre (25 novembre), pendant que le peuple chrétien célébrait la fête de sainte Catherine vierge et martyre, coururent avec empressement sur le rivage de la mer, pour y trouver les corps des naufragés; mais n'ayant rien découvert, ils furent trompés dans l'espoir qu'ils avaient d'être récompensés.
(19) L'an de l'incarnation du Seigneur 1120, le pape Calixte, ayant mis ordre aux affaires ecclésiastiques de France, retourna en Italie.
(20) Le roi Henri ayant perdu sa femme et son fils.
Sources :
BEDE le Vénérable; The Reckoning of Time, Translated, with introduction, notes and commentary by Faith Wallis, Liverpool University press 2004.
SUGER , Oeuvres complètes de Suger , recueillies, annotées et publiées d'après les manuscrits pour la Société de l'Histoire de France par A. Lecoy de La Marche (Paris) 1867.
WILLIAM OF MALMESBURY Chronicle of the Kings of England, from the earliest period to the death of King Stephen With Notes and Illustrations BY J. A. GILES, H.G. Bohn LONDON.
(Article paru dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie, t. LXXII, 2020)
Parmi les rares sources écrites du haut Moyen Âge se rapportant à la presqu’île du Cotentin, existe un bref récit hagiographique relatant le voyage que saint Hermeland accomplit dans le pays (pagus) de Coutances, avec plusieurs de ses frères, « pour la nécessité d’y pourvoir aux affaires de son abbaye »[2]. Ce passage[3] de la Vita Sancti Hermelandi, mentionne sa réception par un noble local du nom de Launus. Il expose comment le saint abbé, pour palier à une pénurie du vin servi aux convives, renouvela lors du dîner le miracle du Christ à Cana. Précision géographique importante, on y voit saint Hermeland se retirer après le dîner dans sa propre demeure, située dans le domaine d'Orglandes (Domini post refectionem ad propriam domum quae est in villa quae dicitur Orglanda, reversus est). Le paragraphe suivant se déroule toujours en Cotentin. Il rapporte comment le saint parvint à guérir un paysan indélicat, puni d’une paralysie pour lui avoir volé la gourde suspendue à la selle de son cheval. Il est précisé que cette gourde fut ensuite, en mémoire de l’évènement, exposée dans l’église Saint-Pierre de la « cella d’Orglandes », où l’affaire avait eu lieu[4]. Le terme de cella désigne ici un petit établissement monastique, un domaine d’exploitation avec oratoire et bâtiment résidentiel, où étaient missionnés quelques frères[5].
Fig.1 : Boutteville, église Saint-Hermeland, statue du maître autel : saint Hermeland (Cl. JD/PAHCC).
Selon sa biographie, rédigée vers l’extrême fin du VIIIe siècle[6], Hermeland était né dans une famille noble de Noyon[7]. Reçu dans la garde privée de Clotaire III (657-673), il fut promu au rang de grand échanson (ou bouteiller) du roi, avant de quitter la cour pour rejoindre l’état monastique au sein de la communauté de Fontenelle. Remarqué pour sa sainteté, il fut ensuite envoyé en mission par l’abbé Lambert (668-v.678) auprès de l’évêque Pasquier de Nantes pour y fonder l’abbaye d’Aindre (Antrum), établie sur une île de la basse Loire[8]. On date habituellement sa mort entre 710 et 720.
Pour tenter de comprendre la portée historique du document, il faut préciser que la Vita sancti Hermelandi, fut écrite à Nantes presque un siècle après les faits, au profit des moines de la communauté d’Aindre. Donat, son auteur, précise avoir recueilli le témoignage de ses frères les plus anciens, et indique parfois s’appuyer sur des documents conservés dans le chartrier de l’abbaye. Son objectif littéraire est de promouvoir la sainteté du père fondateur afin de soutenir le culte dont il faisait l’objet, en particulier au sein de l’église Saint-Pierre, où son corps avait été transféré peu de temps après sa mort. C’est à cet effet qu’il use des ressorts surnaturels propres au genre hagiographique, et consacre une bonne partie de son récit aux nombreux miracles opérés par l’intercession du saint, avant puis après sa mort, sur son tombeau de l’île d’Aindre[9]. Mais l’intention du narrateur est clairement ce faisant de soutenir les intérêts matériels de la communauté. C’est dans ce but qu’il exprime le souci constant de souligner les qualités de bon administrateur de son héros, affairé à la gestion du patrimoine de l’abbaye. Il nous montre Hermeland faisant « le tour des possessions de son monastère pour des raisons utilitaires »[10], soucieux de garantir par ses acquisitions « les revenus terrestres grâce auxquels les frères étaient alimentés »[11]. Donat insiste sur les précautions prises par le saint pourprotéger le monastère contre « toute occasion de domination » de la part de ceux qui souhaiteraient « s'ingérer par la violence » dans son administration[12]. Plusieurs passages se rapportent aux tournées de visite des domaines de l’abbaye d’Aindre et citent les donations reçues et les amitiés nouées parmi les riches et les puissants. Certains de ces extraits, en particulier le récit du séjour à la cour de Childebert III (v. 694-711), renvoient au contenu de donations et d’exemptions, qui se trouvaient conservées dans le chartrier de l’abbaye. Ainsi que l’a observé Bruno Judic, ces différents passages font apparaître les grandes lignes d’un réseau structuré de dépendances domaniales destinées à l’approvisionnement de l’abbaye[13].
Pour l’histoire du Cotentin du haut Moyen Âge, la Vita sancti Hermelandi présente de fait un intérêt multiple. Elle nous informe sur le développement dans cette région de propriétés monastiques relevant de communautés extérieures au diocèse de Coutances et à la province ecclésiastique de Rouen. Elle contribue ce faisant à éclairer une période de l’histoire locale mal connue mais indéniablement marquée, comme dans le reste de la Neustrie du VIIe siècle, par le grand dynamisme du monachisme. Ce texte nous invite à nous interroger sur les conditions de la diffusion d’un culte local, ainsi que sur la géographie des vocables « hermelandiens » identifiés dans ce secteur de la future Normandie. Outre la localisation probable de la cella d’Orglandes, on tentera de vérifier la cohérence de ces implantations, ainsi que leur capacité à révéler un réseau effectivement organisé de dépendances ou de relais monastiques. Cette approche nous conduira à tenter d’esquisser un tableau du paysage religieux dans lequel venait s’inscrire l’action de saint Hermeland en Cotentin à la fin du VIIe siècle.
Le développement d’un culte local
La promotion du culte de saint Hermeland (fig. 1) en Cotentin fait l’objet de deux paragraphes de sa vita. Le premier correspond au récit du miracle de la multiplication du vin survenu chez le noble Launus, où le narrateur prend soin de souligner comment l’évènement fut, le lendemain, « divulgué dans toute la région de sorte que tous ceux qui l’habitaient en gardèrent connaissance »[14]. La capacité des moines d’Aindre à orchestrer puis à médiatiser ce miracle aurait ainsi permis d’inscrire le séjour d’Hermeland dans la mémoire des habitants du territoire. Le second paragraphe concerne la gourde du saint, volée et restituée par un paysan, puis exposée dans « l'oratoire du bienheureux Pierre dans la cella d’Orglandes où cela avait eu lieu ». Le biographe révèle ici que la dévotion au saint s’ancrait dans un objet concret, ayant valeur de relique de contact, un témoignage matériel de sa vertu, que l’on pouvait présenter aux fidèles et aux visiteurs. Une gourde similaire – associée elle aussi à l’un des miracles viticoles de saint Hermeland – était de la même façon exposée aux pèlerins auprès de son tombeau de l’île d’Aindre. En termes à peine voilés, l’auteur de la vita Hermelandi documente un processus organisé de développement d’un culte local, mené par et au profit de sa communauté religieuse.
Tout en relatant les circonstances du développement de ce culte, le narrateur ne perd jamais de vue les bienfaits matériels que les interventions miraculeuses du saint avaient, en contexte, vocation à desservir. Ceci ressort des conclusions du miracle survenu chez le riche Launus, indiquant l’amitié acquise et les libéralités reçues par saint Hermeland, et développant : « si quelqu’un, selon ses capacités, lui faisait la largesse de quelque chose pour la faire bénir, ce bien ne subissait le tort d’aucune diminution, mais en acquérrait ici même, dans le présent, une augmentation de profit en conservant les intérêts du salut éternel »[15]. La même arrière-pensée sous-tend le miracle de la gourde à vin dérobée sur la monture du saint. Objet cultuel, potentiellement lucratif par son attrait sur les pèlerins, cette relique avait aussi valeur de marqueur de propriété. Sa qualité même d’objet volé puis restitué, tandis que son voleur était puni, dénote assez bien la connotation protectrice que l’on souhaitait lui faire jouer. La gourde exposée dans la cella d’Orglandes, en rappelant la geste héroïque du père fondateur, permettait de manifester l’identité du maître des lieux et la légitimité de ses successeurs. En cas de litige, la capacité à produire un tel objet avait valeur de preuve, aidait à se prémunir des convoitises ou des empiètements de pouvoirs concurrents.
On sait que la capacité sacralisante d’une relique insigne s’étendait généralement au sanctuaire élu pour l’abriter, dont le vocable en venait presque systématiquement à adopter celui de son hôte. C’est ainsi que l’abbatiale Saint-Pierre de Rouen fut ensuite dénommée Saint-Ouen ; Saint-Pierre d’Aindre, Saint-Hermeland et Saint-Pierre de Nantus, Saint-Marcouf... L’oratoire Saint-Pierre de la cella d’Orglandes, bien qu’il s’agisse d’un sanctuaire d’un rang plus modeste, et ayant reçu une relique de statut inférieur, a probablement connu un semblable changement de titulature. C’est plus sûrement sous le vocable de Saint-Hermeland qu’il nous faut aujourd’hui le rechercher.
L’église d’Orglandes, placée sous le vocable de Notre-Dame, ne conserve aucune trace, ni parmi les archives consultées, ni dans sa statuaire ou la titulature de ses autels, d’un culte voué à saint Hermeland[16]. Le seul indice mémoriel s’y rapportant sur le territoire de la commune se situait selon Charles de Gerville, auprès du manoir de Rouville,« en un lieu nommé Launay », où aurait autrefois existé une fontaine Saint-Herbland[17]. En plus de l’église paroissiale, le pouillé de 1332 cite les chapelles de Saint-Symphorien et de Saint-Michel[18]. L’abbé Lecanu, en 1839[19], évoque bien une chapelle Saint-Pierre, susceptible donc de correspondre à l’oratoire de la cella d’Orglandes, mais celle-ci n’est pas localisée par l’auteur, ni autrement citée[20] ; il est probable que son existence ait en fait été inférée par l’érudit de la Vita sancti Hermelandi, et non fondée sur un constat effectif.
Au vu des données disponibles, il apparaît plus probable que l’emplacement de la cellad’Aindres où saint Hermeland vint résider, ne soit pas située à Orglandes même, mais à l’emplacement de l’ancien manoir et de l’église Saint-Hermeland de Gourbesville, à 3 km vers l’est (fig. 2). Outre qu’elle est la seule dans un secteur proche à présenter un tel vocable, on sait que la dénomination de Gourbesville/Gausberti-villa résulte d’une formation anthroponymique du Xe siècle, nettement postérieure à la rédaction de la vita sancti Hermelandi. Ce domaine fit en août 1060 l’objet d’une donation du chevalier Richard de Reviers au profit des bénédictins de Saint-Père de Chartres, comprenant le tiers du domaine in terris, in pratis, in aquis, in aecclesia, in bobus[21]. Antérieurement, cette abbaye avait déjà reçu en Cotentin des portions du patrimoine de l’ancien monastère du Ham[22] où elle établit un prieuré, auquel fut rattaché le domaine de Gourbesville[23]. À Barneville et Saint-Jean-de-la-Rivière, sur la côte est du Cotentin, Saint-Père avait reçu d’autres donations issues du démembrement de l’ancienne abbatia de Portbail[24]. Se trouvant intégré à ce lot de « restitutions », il n’est pas du tout invraisemblable que Gourbesville ait également possédé un passé monastique. Son église Saint-Hermeland présente d’ailleurs la particularité de se trouver étroitement intégrée parmi les bâtiments manoriaux de l’ancienne seigneurie ecclésiastique du lieu, selon un schéma d’implantation surtout caractéristique des petits établissements religieux. Noter que l’on remarque, dans le parement du manoir, un bloc de pierre calcaire décoré de trois doubles cercles concentriques, motif trop basique pour autoriser une datation précise, mais qui se retrouve de façon intéressante sur deux claveaux sculptés provenant des anciennes abbayes d’Évrecy et de Livry-en-Bessin, dans un contexte de la fin du VIIe siècle environ[25].
L’église de Gourbesville est située à un carrefour routier secondaire, où se croisent deux axes anciens. La D 126, qui relie Orglandes à l’ouest, constitue l’une des branches d’une importante voirie d’origine protohistorique, traversant toute la presqu’île depuis la baie des Veys jusqu’au port de Diélette. Elle est connue depuis le Moyen Âge sous le nom de querrière Bertran, du nom des barons de Bricquebec qui exerçaient sur elle un droit de vicomtage[26]. L’autre route, actuelle D 69, bifurque en direction du sud vers le Pont-l’Abbé (un ouvrage établi au XIIIe siècle par les abbés de Blanchelande), mais elle rejoignait auparavant la chaussée antique d’Étienville, par un itinéraire qui marque encore le paysage d’une empreinte rectiligne bien perceptible. Vers le nord-est cette route franchissait la rivière du Merderet au bac du port Brehay, et permettait de rejoindre Montebourg, ainsi que le littoral de Saint-Marcouf et le port maritime de Quinéville. Le passage du port Brehay polarisait sur Gourbesville plusieurs voies de circulation secondaires, et donnait probablement lieu au paiement d’un tonlieu.
Ainsi que le suggère la lecture de la vita Hermelandi, il n’est pas improbable que Gourbesville résulte d’une création postérieure à l’époque mérovingienne, issue du démembrement de la plus ancienne et plus vaste entité antérieure que constituait la villa Oglanda[27]. Orglandes constituait sous l’Ancien Régime le chef de l’un des six doyennés du Cotentin. Bien qu’il s’agisse de circonscriptions ecclésiastiques postérieures à l’époque franque, ces doyennés ont souvent conservé dans ce secteur les délimitations de petits pagi du Xe siècle, eux-mêmes fréquemment hérités de centenae ou vicariae mérovingiennes[28]. Au tout début du VIIIe siècle, du vivant de saint Hermeland, des conditae – des subdivisions territorialesde même nature –sont attestées en Cotentin[29]. L’étymologie d’Orglandes – orthographié Oglanda/Oglenda dans la vita sancti Hermelandi – est issue d’un hydronyme « prélatin » désignant un territoire délimité par des cours d’eau[30]. Cette notion ne se rapporte pas physiquement à la commune actuelle, mais convient bien à l’espace plus étendu de son ancien doyenné. La villa d’Orglandes a donc pu constituer au VIIe siècle le centre d’une petite subdivision juridique et fiscale locale, qui fut peut-être elle-même associée à un habitat aristocratique. Elle occupe également, au carrefour de la grande voie antique menant de Coutances à Valognes et de l’ancienne querrière Bertran, une situation favorable à l’implantation d’un petit vicus. L’origine pré-normande de son église Notre-Dame (dont l’architecture appartient principalement aux XIIe et XIIIe siècles) semble avérée par un certain nombre d’indices archéologiques, tels que la présence en remploi parmi les maçonneries de fragments de briques romaines et de morceaux de sarcophages du haut Moyen Âge[31]. Son vocable marial est compatible avec celui d’une grande paroisse mère du haut Moyen Âge.
Fig. 3 : Les sanctuaires « hermelandiens » du Cotentin reportés sur la carte du diocèse de Coutances par Mariette de la Pagerie (1689), détail.
Géographie cotentine des sanctuaires hermelandiens
Le culte d’Hermeland a laissé des traces nombreuses en d’autres points du diocèse de Coutances. Saint patron de la paroisse de Sottevast, il était également vénéré au Plessis-Lastelle, où subsiste la chapelle d’un ancien prieuré de l’abbaye de Lessay qui était placée sous son vocable. Avec Notre-Dame, il est le patron de l’église des Moitiers-en-Bauptois et était également vénéré à Boutteville, non loin de Sainte-Mère-Eglise, où se tenait à l’époque ducale une foire le jour de sa fête (15 octobre)[32].
La cartographie des sanctuaires hermelandiens du Cotentin attire l’attention par son apparente cohérence (fig. 3). Elle semble révéler un lien étroit avec les principaux axes de circulation irriguant le nord du Cotentin, et fonctionner ainsi comme un ensemble relativement organisé de relais jalonnant des itinéraires routiers. Ceci est particulièrement net pour l’ancien prieuré Saint-Ermeland du Plessis (Sancti Ermelandi juxta Plesseyum) au Plessis-Lastelle (fig. 4) et pour l’église de Moitiers-en-Bauptois (fig. 5), qui sont tous deux littéralement accolés à la voie romaine menant d’Alauna (Valognes) à Cosedia (Coutances) via Orglandes. L’église Saint-Hermeland des Moitiers se trouve en outre placée au débouché exact de la chaussée antique submersible qui servait à franchir, en ce point, la rivière d’Ouve[33]. Depuis Orglandes un axe secondaire, figuré en 1689 sur la carte de Mariette de La Pagerie, permettait de relier parle pont deSottevast Cherbourg (Coriallo) et la route de la Hague. La position de l’église Saint-Hermeland de Boutteville, dans le Plain, est plus écartée de l’axe des grandes voiries nord-sud reliant Cherbourg, Valognes et Coutances. Elle se trouve en revanche au débouché presque immédiat de la baie des Veys, qui fut jadis le point de passage privilégié entre le Cotentin et le Bessin. Les actuelles D 40 et D 70 qui encadrent la commune correspondent aux deux branches méridionales de la « Carrière Bertran », cette importante route d’origine protohistorique, reliant aussi Orglandes et Gourbesville au Grand-Vey.
Fig. 4 : Le Plessis-Lastelle, chapelle de l’ancien prieuré Saint-Hermeland (Cl. JD/PAHCC).
Outre leur répartition le long des grands axes antiques, il est notable que soient aussi nombreux, parmi les églises cotentines vouées à saint Hermeland, les sanctuaires susceptibles de posséder des antécédents monastiques d’époque franque. Cela ressort nettement pour Gourbesville, ainsi que nous l’avons évoqué, mais aussi pour la chapelle du Plessis-Lastelle, qui était le site, à l’époque ducale, d’un prieuré bénédictin. On sait grâce aux travaux de Lucien Musset, que cette affectation priorale fut le destin commun de nombreux établissements monastiques pré-normands démembrés au cours des IXe-Xe siècles[34]. Aux Moitiers-en-Bauptois la tradition d’un passé monastique véhiculée par les érudits ne s’appuie sur aucune source vérifiée[35], mais la dénomination du lieu par un toponyme dérivé du latin monasterium décliné au pluriel, suggère la possible existence d’un groupe ecclésial du haut Moyen Âge. Au Plessis l’association de deux chapelles au sein du même ensemble prioral est attestée au XIVe siècle par le pouillé diocésain[36]. On trouve enfin, établi sur l’« aumône » de l’église Saint-Hermeland de Sottevast, un petit établissement monastique qui dépendait depuis le XIIe siècle de l’abbaye de Lessay[37] (fig. 6). Les indices topographiques et archéologiques disponibles apparaissent pour chacun de ces monuments, favorables à l’hypothèse d’une occupation cultuelle antérieure à l’époque ducale. Sans être totalement discriminante, la présence de fragments de calcaire coquillier à sarcophage visibles en remploi dans leurs maçonneries constitue un critère particulièrement récurrent.
Fig. 5 : Archives nationales, « Plan du cours de la rivière Douve depuis le pont de Saint-Sauveur-le-Vicomte jusqu’au four de Taute… », c.1760 (Arch.Nat., N 11 Manche 17), détail : l’église Saint-Hermeland des Moitiers-en-Bauptois.
Un tel faisceau d’indices suggère bel et bien que ces différents lieux ont pu constituer, au haut Moyen Âge, un réseau organisé de dépendances, relais ou succursales monastiques[38]. Le patronage spirituel du père fondateur, tel qu’il s’exprime par ces titulatures, semble en ce sens fonctionner comme un marqueur effectif de propriété. Plutôt que le seul produit des dévotions populaires locales, ou le reflet des hypothétiques itinéraires de mission empruntés par le saint[39], c’est l’affichage d’une appartenance communautaire qui apparaît ici prédominante. Même s’il s’agit d’un critère incertain, délicat à manier, il paraît avéré que de nombreux vocables partageaient cette même fonction de marqueur identitaire. Sans minimiser la garantie de sa protection tutélaire, le choix du saint patron apparaît d’abord « révélatrice de l’origine ou du milieu auquel appartenaient le ou les fondateurs du lieu de culte »[40]. Dans le cas de sanctuaires relevant d’un monastère, ce marqueur nominal permettait de conserver la mémoire d’une légitime possession. Les vocables hermelandiens du Cotentin apparaissent bien en ce sens révéler, jusqu’à un certain degré, l’emprise et l’étendue du temporel d’Aindre dans le diocèse de Coutances à la fin du VIIe siècle[41].
Fig. 6 : La ferme de l’abbaye de Sottevast, « aumône » de l’église Saint-Hermeland (Carte postale ancienne, Archives départementales de la Manche, 6FI579).
La cella d’Orglandes dans la topographie religieuse du VIIe siècle en Cotentin
On peut envisager à ce titre que la cella d’Orglandes occupait une place précise au sein des circuits d’approvisionnement de l’abbaye nantaise.La géographie uniquement terrestre décrite dans la vita sancti Hermelandi, situe le Cotentin au point de convergence des aires d’influences de la basse Seine et de la Loire. Son témoignage vient sur ce point à l’appui d’autres données textuelles ou archéologiques, qui attestent le développement d’échanges soutenus entre ces deux pôles au cours des VIIe-VIIIe siècles[42]. Ne doit-on en particulier soupçonner des enjeux économiques derrière le miracle de la pénurie de vin, mettant en exergue la capacité du saint à fournir à profusion un tel breuvage, « dans cette région où la vigne ne pousse guère »[43] ? Il n’est pas exclu que ce passage nous renseigne, de façon allusive, sur la constitution de réseaux d’échanges commerciaux, servant à exporter ou faire transiter par le Cotentin une partie de la production des vignobles de l’abbaye d’Aindre[44]. En retour, on sait que le Cotentin pouvait fournir en abondance du lard de cochon et de cétacé, des bovins sur pied, du cuir ou du bois. Il est peut-être significatif que le paragraphe faisant suite au miracle de la gourde volée et restituée de la cella d’Orglandes mette en scène le vol d’un charroi de bois tracté par des bœufs[45].
Déjà touché sous Childebert Ier par une vague précoce de monachisme érémitique, le diocèse de Coutances a vu s’implanter au VIIe siècle de nouvelles communautés religieuses, inspirées comme Aindre du modèle colombanien[46]. La première, vers 610, fut Orval, suivie à la fin du siècle par Saint-Fromond et le Ham. Lors du séjour d’Hermeland en Cotentin, au cours des décennies 680-690 environ, le monastère d’Orval avait déjà essaimé en direction des provinces de la Morinie. À l’appel de saint Omer, originaire comme eux de cette localité proche de Coutances, les moines Bertin et Ebertram avaient rejoint le diocèse de Therouanne pour y fonder le monastère de Sithiu. Mommole, leur compagnon, fut appelé vers 660 à succéder à saint Éloi sur le siège épiscopal de Noyon, cité dont saint Hermeland serait originaire. On sait que d’étroites relations unissaient dans ces années là Thérouanne à l’abbaye de Fontenelle[47]. Lors de ses années de formation le saint abbé d’Aindre avait nécessairement développé des liens privilégiés avec les membres de ce réseau ecclésiastique. Il disposait déjà par ce biais de forts soutiens potentiels à l’intérieur du diocèse de Coutances.
Si l’on se fie à la chronologie de nos sources, assez peu d’années séparent le voyage d’Hermeland à Orglandes (v. 680-690) de la dédicace de l’autel de l’abbaye féminine du Ham par l’évêque Fromond le 15 août 678[48] (fig. 7). Le roi Thierry III, qui figure sur l’inscription de l’autel comme référent de sa date de fondation, est également nommé en tant que donateur du lieu de son établissement. Il s’agissait donc d’une fondation épiscopale, établie sur un fisc royal. Espacées de seulement trois kilomètres à vol d’oiseau, les églises Saint-Hermeland de Gourbesville et Saint-Pierre du Ham sont séparées par la rivière du Merderet, qui était jadis navigable sur cette portion de son lit, et équipée d’un passage à bac permettant son franchissement[49]. Cette topographie n’est pas sans rappeler celles de certains « monastères doubles », qui ont surtout fleuri en Gaule et en Angleterre au cours du VIIe siècle[50], et il est notable que le Ham et Gourbesville se trouvèrent réunis au XIe siècle en une seule propriété monastique, sous la tutelle de Saint-Père de Chartres. Mais cette hypothèse, qui supposerait que les deux établissements aient partagé un même fondateur, et/ou une même abbesse ou abbé, reste peu probable. On peut considérer en revanche que leur proximité géographique rendait inévitable l’existence d’interactions.
Fig. 7 : Autel de l’ancienne abbaye féminine du Ham, dédicacé le 15 août 678 par l’évêque Fromond (Cl. JD/PAHCC).
Dans un secteur encore très proche, à une dizaine de kilomètres seulement de la cella de saint Hermeland, se trouvait aussi l’important monastère de Nantus, fondé au VIe siècle par saint Marcouf sur la côte est du Cotentin[51]. À une date située environ entre 660 et 680, son abbé, Ernouin, fit procéder au transfert des reliques du saint fondateur dans une apsis nouvellement aménagée, au chevet de la basilique Saint-Pierre, dans un coffre scintillant de pierreries et d’or (thecam gemmis auroque politam) (fig. 8). En cette occasion, c’est saint Ouen de Rouen en personne qui vint présider à la cérémonie[52]. L’évêque Ouen, « the most influential and the most famous of the Frankish nobility »[53], possédait lui-même des attaches en Cotentin puisqu’il y détenait le domaine de Brisniacus, offert par ses soins à l’église Saint-Pierre de Rouen[54]. Par tous ces aspects, on perçoit à quel point la filiation unissant Hermeland au milieu rouennais a pu faciliter l’ancrage de l’abbaye d’Aindre dans la presqu’île du Cotentin.
De fait, les opportunités d’implantation dont l’abbaye d’Aindre a bénéficié dans ce secteur profitèrent aussi, peu après le séjour d’Hermeland à Orglandes, au monastère Saint-Florent du Mont-Glonne (Maine-et-Loire), tributaire d’importantes donations foncièresin pago Constantino, v. 717-718[55]. Unie à Aindre par d’étroits liens de fraternité[56] l’abbaye du Mont-Glonne renforçait par cette implantation le réseau des amicitia monastiques locales. Vers 740, le monastère de Fontenelle, qui continuait d’exercer sa tutelle sur la communauté d’Aindre[57], recevait une portion de la villa de Lestre[58].
En plus des établissements cités, le Cotentin abrite d’autres sites sensibles, potentiellement marqués par des antécédents monastiques du haut Moyen Âge. On attribue avec vraisemblance à l’évêque Frodomundus de Coutances, l’implantation d’une communauté dans la basse vallée de la Vire, au cœur d’une ample vallée alluviale, sur un point de franchissement du fleuve, à la frontière du diocèse de Bayeux[59] . Il existe plusieurs légendes tardives et concurrentes de la vie de saint Fromond, mais la principale donnée acquise est que cet évêque de Coutances, connu uniquement par l’inscription de l’autel de l’abbaye du Ham, fut inhumé dans le monastère qu’il avait fondé sur la Vire, et d’où ses reliques furent transférées vers Fécamp à la fin du IXe siècle[60].
Fig. 8 : Saint-Marcouf, église Saint-Marcouf, l’abside romane reposant sur une crypte du XIe siècle, probable reprise en plan de l’ « apsis » du VIIe siècle ou fut transféré le corps du saint fondateur (Cl. JD/PAHCC).
Il n’est pas improbable qu’ait existé un autre établissement religieux de quelque importance sur le site de l’église de Sainteny, à 15 km à l’ouest de Saint-Fromond. Indépendamment de douteuses traditions attribuant cette fondation à saint Hermeland[61], son vocable Saint-Pierre, et son devenir postérieur en tant que prieuré de l’abbaye de Saint-Nicolas d’Angers, sont des indices favorables à l’hypothèse d’un passé monastique. La découverte sur les lieux d’une dalle de pierre calcaire sculptée d’un décor d’entrelacs typiquement carolingien vient aussi accréditer cette hypothèse[62]. Cet établissement pourrait logiquement avoir été lié à l’exploitation d’importantes carrières de calcaire coquillier, intensément sollicitées du VIe au VIIIe siècle pour la production de sarcophages. Pour ce qui concerne l’abbatia de Portbail, le fonctionnement de son baptistère et de sa nébuleuse de sanctuaires urbains (Saint-Michel, Saint-Martin, Notre-Dame et Saint-Pierre, Saint-Médard), apparaît assez bien assurée durant le VIIe siècle, principalement par l’activité de ses nécropoles[63].
Il existe d’autres présomptions de passé monastique pour Gatteville, Les Moitiers-d’Allonne et Vesly, où subsistent des couples ecclésiaux dédiés à saint Pierre et Notre-Dame associés à des sites d’inhumation d’époque franque[64]. À l’échelle de plus modestes cellae, ermitages ou éventuels xenodochia du haut Moyen Âge, le corpus est susceptible de s’enrichir de plusieurs petits sanctuaires ruraux, constitués d’une chapelle et d’un habitat associé, les plus connus comme prieurés à l’époque ducale. Véritables conservatoires archéologiques ces édifices concentrent à la fois des indices de nécropoles mérovingiennes et d’occupations antiques (Barnavast à Teurtheville-Bocage[65], Saint-Michel de Vauville[66], Monaqueville à Saint-Germain-le-Gaillard[67], Saint-Pair à Morville, Saint-Martin-à-l’If à Sauxmesnil…). Les bâtiments du prieuré Saint-Pierre de La Luthumière à Brix, dépendance au XIIe siècle de l’abbaye de Saint-Sauveur-le-Vicomte, regorgent par exemple de briques antiques et de fragments de sarcophages. Ils côtoient, à 200 m de distance, une chapelle Saint-Jouvin, dite Heremitagium de Sancto Jovino dans une charte du XIIe siècle. Avec sa fontaine guérisseuse ce petit sanctuaire constituait, sur la rive nord de la rivière d’Ouve, une enclave et une dépendance de la paroisse Saint-Hermeland de Sottevast[68].
Fig. 9 : Prieuré Saint-Pierre de la Luthumière à Brix (Cl. JD/PAHCC).
Outre les découvertes de sépultures documentées par l’archéologie, la capacité particulière qu’offre, en Cotentin, la lecture indicielle des réutilisations de fragments de sarcophages en calcaire coquillier de Sainteny dans le bâti religieux, permet de cartographier un dense réseau de sites potentiels d’inhumation de l’époque franque (VIe-VIIIe siècles)[69]. Au vu des données rassemblées à ce jour, on peut estimer qu’environ 60 à 70 % des chapelles ou églises d’Ancien Régime recensées sur le sol du Cotentin ont pu se trouver associées dans leur genèse à une occupation funéraire mérovingienne. On pressent que la constitution de ce tissu ecclésial a pu très tôt se structurer autour des grands pôles monastiques, ceux en particulier, comme Nantus et Sesciac, dont le territoire s’étendait sur de vastes zones littorales. Mais bon nombre parmi ces églises trahissent davantage, par leur implantation, une probable origine domaniale. Elles montrent un lien structurant avec l’espace de la seigneurie, venant le plus souvent se loger en appendice, à la périphérie étroite de la réserve ou « domaine non fieffé ». Ce type d’observations est à mettre au crédit d’une grande pérennité des structures domaniales héritées de l’époque franque, largement réinvesties à l’époque ducale.
Propriétaires terriens et régime domanial
L’intervention de Launus, quidam nobilis illius prouinciæ vir, dans le récit du voyage de saint Hermeland en Cotentin permet de référencer l’un des rares représentants des élites nobiliaires mentionné à l’époque franque dans ce secteur. Pour le VIIe siècle, on peut également citer Friulfus et Domitta, parents d’Audomarus (saint Omer), originaires d’Orval[70], ainsi qu’Agulfo, détenteur v. 660 de la villa Vausune, non localisée[71]. Ouen de Rouen, ancien référendaire de Dagobert, issu d’une famille de riches propriétaires terriens, y détenait la villa Brisniacus, dont il fit don, durant son épiscopat, au monastère Saint-Pierre de Rouen. Adalbertus, fils de Waldebertus, est cité avec ses cinq frères comme auteurs d’une donation de six domaines situés in pago Constantino, dans une charte déjà citée du monastère Saint-Florent du Mont-Glonne[72]. Ce document présente l’intérêt de détailler la composition des biens offerts en aumônes, comprenant tam curtis et mansas, casis, domibus, edificiis, peuplés d’hommes libres et d’esclaves, avec leurs terres, leurs champs et leurs bois (cum terris, pratis, silvis). Avec Adalbertus, comme Ouen de Rouen et Agulfo, nous nous trouvons en présence de grands propriétaires fonciers, disposant de domaines dispersés au sein de plusieurs provinces des Gaules, qui ne résidaient au mieux dans leurs villae du Cotentin que de façon ponctuelle. Rien ne permet en revanche de rattacher ces individus à des lieux de pouvoir relevant de la catégorie des castra, des burgi ou des castella. Il faut attendre une époque plus avancée du VIIIe siècle, voire les années 830, pour trouver les premières mentions de châtelains occupant des habitats fortifiés de hauteur[73]. Ce constat pourrait induire que la militarisation des élites n’est avérée dans ce secteur que postérieurement au VIIe siècle, mais il repose sur encore trop peu de données pour être généralisé.
Conclusion
Lorsqu’il chevauchait avec ses frères vers la cella d’Orglandes, Hermeland parcourait un territoire équipé de routes, ouvert sur de multiples débouchés portuaires, un paysage jalonné d’abbayes et recouvert d’une abondante nébuleuse d’édifices religieux. Mais la Vita sancti Hermelandi qui débute à l’apogée du monachisme franc couvre aussi une période particulièrement critique de l’histoire de la Neustrie, passée après 687 sous la domination des maires du palais d’Austrasie. Il est significatif qu’après cette date, et jusqu’à l’époque ducale, on ne relève plus de nouvelles fondations monastiques sur le territoire de la future Normandie. La mention du déplacement d’Hermeland à la cour, pour obtenir du roi Childebert IV (v. 694-711) un précepte de protection, « de sorte que la domination d’aucun autre pouvoir ne présume de s’ingérer pour inquiéter les moines »[74], traduit-elle la nécessité dans laquelle se trouvait son monastère de composer avec le régime des pippinides, pour préserver son intégrité ? De tels enjeux sous-tendent assez nettement le récit de la visite faite à l’abbaye d’Aindre par le comte Agatheus. Accompagnées d’un flot opportun d’excellent vin rouge, les paternelles exhortations d’Hermeland auraient permis d’atténuer la cruauté de cet homme vorace aux mœurs dissolues. Si l’on considère qu’Agatheus fut dans le même temps le comte et l’évêque des cités de Nantes et de Rennes, ainsi qu’évêque de Chartres (v. 698-705), et de Coutances[75], on mesure l’étendue du pouvoir dont il jouissait, et le degré de noyautage politique des institutions ecclésiastiques de ce secteur. En faisant intervenir ce personnage, la vita Hermelandi nous informe indirectement sur l’histoire du commandement de la Marche de Bretagne, et nous rappelle au besoin que le Cotentin en fut partie constituante[76] . Le destin ultérieur de ce territoire sera de fait marqué en profondeur par sa position frontalière entre Francia et Britannia, au détriment des propriétés monastiques, requises pour soutenir l’effort de guerre[77].
Julien Deshayes
Pays d'art et d'histoire du Clos du Cotentin
Université de Caen, CRAHM, UMR 6577
[1] Communication présentée à la séance du 1er décembre 2018. Remerciements à nos confrères Jacques Le Maho et Daniel Levalet pour leurs apports lors de la rédaction de cet article. Merci également au Pays d’art et d’histoire du Clos du Cotentin, service de la Communauté d’agglomération du Cotentin, qui nous offre le cadre et les moyens de réaliser les recherches dont les résultats sont présentés ici.
[2] « De sancto Hermelando, abbate Antrensi in Gallia », Acta Sanctorum, t. III, Anvers, Soc. des Bollandistes, 1678 (rééd. Bruxelles 1968), p. 574-586 (25 mars) ; Vita S. Hermelandi, in Wilhelm Levison (éd.) Monumenta Germaniae Historica Scriptores Rerum Merovingicarum, vol. 5, Hanovre-Leipzig, 1910, p. 674-710.
[4]Vita S. Hermelandi, chap. 12 : in testimonium vsque in præsens perseuerat, pendens in oratorio beati Apostoli Petri in O(r)glanda cella.
[5] La Vita S. Hermelandi mentionne d’autres cellae de l’abbaye d’Aindre, dont celle de Craon (Vienne) où résidait « un moine vénérable » qu’Hermeland « avait placé à cet endroit pour superviser cette même cella et une autre appelée Colon ».
[6] Bruno Judic, « Quelques réflexions sur la Vita Ermelandi », Revue du Nord, t. 86, 2004, p. 499-510.
[7]Ex Nouiomagensium incolarum nobilissimis parentibus ; désigne plus probablement Noyon que Nimègue ou Lisieux (Noviomagus Lexoviorum).
[8]La fondation de l’abbaye d’Aindre par Hermeland est également mentionnée dans une interpolation à la vie de saint Ansbert rédigée par le moine Aigrard de Fontenelle (Acta Sanctorum, III, p. 575 : B. Hermelandus in quadam insulà alvei Ligeris quœ voca[ba]tur Antrum, iuxta nominis ejusdem proprietatem, monachorum venerabile edificavit cœnobium).
[9] D’abord enterré dans une chapelle vouée à saint Wandrille le corps d’Hermeland avait ensuite été transféré dans l’église Saint-Pierre, devant l’autel majeur, dans un tombeau « préparé à cet effet par des ouvriers habiles » crastina ita per omnem regionem divulgata est, ut omnes illic commorantes cognoscerent .
[10]Pater vtilitatis gratia res monasterii sui circuiret, chap. 28.
[11]Cf. chap. 22 : Hic quoque vir Domini summa discretione prouidus, [solicitus pro suis,] sui sibique commissorum curam æquo ita perpendebat libramine, vt nec pro custodia sui necessaria Fratrum funditus ministrare negligeret, nec rursus pro terrenis stipendijs, quibus Fratres sustentabantur, sui custodiam circumspiciendo retentare negligeret.
[12] Cf. chap. 10 : vt nulla alia potestas, maligno instigata spiritu, omni dominationis occasione sublata, molestiam habitantibus in eo ingerere audeat.
[13] B. Judic, « Quelques réflexions … », loc. cit., p. 508-509.
[14]Crastina ita per omnem illam regionem diuulgata est, vt omnes illic commorantes cognoscerent.
[15]Vita S. Hermelandi, chap. 24 : ut si quis ei de facultatibus suis aliquid benedictionis gratia largiretur, nullius diminutionis dman incurreret quin potius augmentationis lucra salua eternus mercede hic etiam in parzesenti acquireret (traduction proposée par l’auteur de l’article).
[16] On a voulu parfois reconnaître Hermeland parmi les figures du petit tympan roman (v. 1140-1160 ?) placé au portail sud de la nef (situé initialement sur la porte sud du chœur), mais leur iconographie et leur physionomie désignent clairement les saints Pierre et Paul, encadrant le Christ en gloire entouré du tétramorphe. Parmi la statuaire ancienne on ne relève qu’une Vierge à l’Enfant (début du XVIe siècle) et un Saint-Jacques du XVe siècle. Au nombre de titulatures d’autels secondaires, saint Jean-Baptiste, peut-être associé aux fonts baptismaux. À la Révolution, selon le curé Édouard Marguerie (1831-1882) « L’église fut dévastée par une horde de misérables envoyés de Montebourg. Les cloches furent enlevées, les statues presque toutes mutilées ou brisées, les registres et les ornements publiquement brulés ».
[17] Charles de Gerville, Voyages archéologiques dans la Manche (1818-1820), éd. Dr Michel Guibert, Saint-Lô, Société d’archéologie, 1999, t. I, p. 253. Non identifiée sur le terrain, bien que subsistent en effet des parcelles nommées « Launay » (i.e. l’aulnaie) situées à Orglandes au sud du manoir de Rouville.
[18]Cf. Auguste Longnon, « Pouillés de la Province de Rouen », Recueil des historiens de la France, Pouillés, t. II, Paris, Impr. nat., 1903, p. 299 : In parrochia [de Orglandis] sunt due capelle, una de sancto Symphoriano et altera de sancto Michaele ; non habent capellanos nec redditus sed oblationes earum pertinent ad rectorem. Cette dernière se trouvant probablement implantée sur le domaine de la « Croûte Saint-Michel », non loin de la Hougue, à 200 m de l’église environ. Lors de la rédaction du premier pouillé, ou « Livre Noir » du diocèse de Coutances, vers 1251-1280, les revenus de la dîme se trouvaient partagés entre deux seigneurs locaux Richard de Saint-Germain et Richard d’Orglandes. Cette situation évolue dans le premier tiers du XIVe siècle, lorsque le chapitre de la cathédrale de Coutances, profitant du morcellement des droits hérités de Richard d’Orglandes, opère une série d’acquisitions ciblées dans la paroisse.
[19] Abbé Auguste Lecanu, Histoire des évêques de Coutances depuis la fondation de l'évêché jusqu'à nos jours, Coutances, Voisin, 1839, p. 533. Repris par J. M. Renault dans l’Annuaire du département de la Manche, « Notes historiques et archéologiques sur les communes de l’arrondissement de Valognes », 1874.
[20] Sinon par reproduction non vérifiée du propos de Lecanu, cf. J. M. Renault, loc. cit., p. 29.
[21]Marie Fauroux, « Recueil des actes des ducs de Normandie de 911 à 1066 », M.S.A.N., t. XXXVI, 1961, n° 147, p. 328-340 ; Benjamin Guerard, Cartulaire de l’abbaye de Saint-Père de Chartres, Paris, Crapelet, 1840, t. I, cap. XXVII, p. 152-153 ; donation effectuée par le chevalier Richard ; le droit de patronage de l’église fut ensuite perdu par Saint-Père-de-Chartres et récupéré par l’abbaye de Montebourg et le seigneur laïc de la paroisse (Longon, Pouillé 1332, p. 302).
[22] B. Guerard, Cartulaire…, op. cit., t. I, cap. III, p. 108-109, et p. 611, n° CXXII : v. 1132-1151, Guillaume d’Aubigny, concède pour l’âme de ses ancêtres et la sienne ecclesias de villa que vocatur Ham, et earum redditus, scilicet terram et ea que ipsis ecclesiis pertinent. Précisons que la donation fut effectuée en présence de l’évêque Algare, en l’abbaye de Saint-Sauveur-le-Vicomte.
[23] B. Guerard, Cartulaire…, op. cit., t. II, p. 824.
[25] Lucien Musset, « L’église d’Évrecy et ses sculptures préromanes », B.S.A.N., t. LIII, 1955-1956 (1957), p. 126-168 ; J. Deshayes, « Livry (14) : l’église paroissiale Notre-Dame et ses remplois préromans », B.S.A.N., t. LXXIII, 2014 (2016), p. 9-54.
[26]Cf. Jack Lepetit-Vattier, « Un chemin seigneurial de Bricquebec, la querrière Bertran », in Sur la route de Louviers... voies de communication et moyens de transport de l’Antiquité à nos jours, actes du 42e congrès des sociétés historiques et archéologiques de Normandie, Louviers, 18-21 octobre 2007, Louviers, 2008, p. 81-90 ; J. Deshayes, « Châteaux, seigneuries et voies de communication du Cotentin médiéval », Voies de communication…, ibid., p. 65-80.
[27] Cette analyse rejoint celle proposée par Jean-Pierre Bruntec’h pour la paroisse de Saint-Herblon, proche jadis de l’abbaye d’Aindre, lorsqu’il se demande si celle-ci « ne résulte pas du démembrement d’un champ beaucoup plus vaste, dont elle formerait la partie occidentale » ; cf. « Géographie historique et hagiographie : la vie de saint Mervé », Mélanges de l’École française de Rome, t. 95, n° 1, 1983, p. 8.
[28] J. Deshayes, « Les circonscriptions religieuses et juridiques du Cotentin médiéval : un reflet de la territorialisation antique de l’ancienne cité de Unelles ? », in L’Antiquité en Basse-Normandie, Projet collectif de recherche, 2013, 3e année, Caen, 2014.
[29] M. P. Marchegay, « Chartes normandes de l’abbaye de Saint-Florent près Saumur », M.S.A.N., t. XXX, fasc. 1, 1880 : in pago Constantino, in condeda Quasnacinse.
[30] François de Beaurepaire, Les noms des communes et anciennes paroisses de la Manche, Paris, Picard, 1986, p. 172 et 114 ; le concept de toponyme « prélatin » devant probablement être réévalué : plutôt qu’un héritage antérieur à la romanisation il semble que ces noms de lieux soient majoritairement liés au phénomène du renouveau linguistique gaulois du Bas-Empire, donc plus aptes à refléter des phénomènes de territorialisation datant de cette période.
[31] D’autres découvertes de tuiles antiques ont été signalées par Gerville. Nous avons observé aussi un fragment de cuve de sarcophage en calcaire coquillier d’environ 30 x 60 cm affleurant dans le cimetière, ainsi qu’un bloc à inscription latine dans le mur est de la tour de clocher, avec des caractères non clairement déchiffrés, d’une épigraphie visiblement antérieure au XIIe siècle.
[32] Dans la Hague, sur une colline qui domine l’anse de Vauville, subsiste une chapelle conjointement vouée à l’archange saint Michel et à un « saint Hermel » que l’on a parfois rattachée à saint Hermeland, mais qui désigne plus sûrement le breton saint Armel. À Sainteny, au sud de Carentan se rapporte une autre tradition, tout aussi peu fondée, d’implantation monastique attribuée à l’abbé d’Aindre.
[33] L. Jeanne, C. Duclos, L. Paez-Rezende, D. Aoustin, P.-Y. Jolivet, L. Lespez, Y. Le Digol, L. Vipard, Étienville (50) « la Cour ». Un pont-long sur la voie antique Alauna (Valognes) - Cosedia (Coutances) : la traversée des marais de la Douve et son franchissement à gué, document final de synthèse – Sondages. Cherbourg, GRAC (Groupe de recherches archéologiques du Cotentin), 86 p.
[34]L. Musset, « Monachisme d’époque franque et monachisme d’époque ducale en Normandie, le problème de la continuité », in Aspects du monachisme en Normandie, IVe-XVIIIe siècles, Paris, Vrin, 1982, p. 55-74. Cela concerne en Cotentin la plupart des fondations connues de l’époque mérovingienne, telles qu’Orval, Portbail, Saint-Fromond, Saint-Pair ou le Ham, toutes réaffectés en prieurés bénédictins au cours du XIe siècle
[35] Abbé Lecanu, Histoire du diocèse de Coutances et Avranches, Coutances, Salette, t. II, 1878, p. 447 ; note « Dans les vieux registres on lit les Moustiers et les Moutiers, ce qui se traduit toujours par monasteria, et ce pluriel indique deux monastères ou deux églises dans le même monastère, comme à Landelles, à Orglandes, aux Moitiers-d'Allonne. Il a été retrouvé entre l'église paroissiale et le marais de nombreuses fondations, qu'on a considérées alors comme des restes de ces anciens monastères. Aucun fait postérieur à l'établissement des Normands ne venant s'y rattacher, il est probable que leur existence est antérieure, qu'ils n'ont pas été relevés et qu'ils avaient été fondés par saint Ermeland, abbé d'Aindres, ou par les moines d'Orglandes ».
[36] A. Longnon, Pouillés …,op. cit., p. 327 : in dicta parrochia est prioratus de Sancto Ermelando ; in dicto prioratu sunt due capelle.
[37] J. Deshayes, « Le manoir Sainte-Suzanne de Sottevast, un ancien domaine monastique de l’abbaye de Lessay », Vikland, n° 27, 2018, p. 46-54.
[38]Plusieurs sites peuvent en particulier évoquer, tantôt par leur implantation sur un grand axe routier (Le Plessis) et/ou un passage de rivière (Les Moitiers-en-Bauptois, Sottevast), de possibles xenodochia, destinées à porter assistance aux voyageurs et aux pauvres. Cf.Jean Heuclin, « Des routes et des hommes en Gaule durant le haut Moyen Âge », Revue du Nord, n° 391-392, 2011, p. 735-748 ; Jacques Le Maho, « Hospices et xenodochia du diocèse de Rouen à l’époque prénormande », in Fondations et œuvres charitables au Moyen Âge, actes du 21e congrès national des sociétés historiques et scientifiques, Nice, C.T.H.S., 1996, p. 49-61.
[39] Sachant qu’il est plus probable qu’Hermeland, s’il devait avoir fondé lui-même de nouveaux sanctuaires ou déterminé le choix de leur vocable, aurait privilégié des titulatures à saint Ouen (nombreuses en Cotentin), Saint Lambert (désigne un point de passage entre Bessin et Cotentin, sur la basse Vire), ou encore de saint Wandrille (non référencé) et de saint Léger (vocable de l’oratoire insulaire de l’abbaye d’Aindre, jadis vénéré à Anneville-en-Saire, Orval, Marigny...).
[40] Jacques Le Maho, « Remarques sur l’origine des dédicaces des églises paroissiales », texte inédit d’une communication présentée à Saint-Lô dans le cadre du colloque « La Paroisse en Normandie » tenu du 28 au 30 novembre 2002. Qu’il soit ici remercié de nous en avoir permis la lecture.
[41] Les sanctuaires hermelandiens du Cotentin seraient en ceci comparables aux paroisses Saint-Herblon/ Saint-Herblain/Saint-Erblon de la Basse-Loire, dont A. Chédeville et H. Guillotel pressentaient de façon similaire l’appartenance au temporel de l’abbaye d’Aindres ; cf.La Bretagne des saints et des rois Ve-Xe siècles, Rennes, Ouest-France, 1984, p. 170. Une étude reste à développer à propos des sites « hermelandiens » de la Boulouze (Avranchin) et de Rabodanges, et leur relation avec les itinéraires routiers conduisant d’Aindre vers la cella de Créon, parfois localisée à Urou-et-Crennes, aux portes d’Argentan (cf. B. Judic, « Quelques réflexions… », loc. cit., p. 508).
[42] Noël-Yves Tonnerre, « Le Commerce nantais à l’époque mérovingienne », Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, 1986, p. 299-321 ; J. Le Maho, « Transports de matériaux de construction dans la basse Seine et ses abords au haut Moyen-âge, le témoignage des textes et de l’archéologie », in Matériau et construction en Normandie du Moyen Âge à nos jours, actes du colloque tenu à Saint-Lô les 24 et 25 novembre 2000, Saint-Lô, 2004, p. 11-32.
[43]In regione quippe eadem vinum minime nascitur.
[44] Sans évoquer directement les vignobles de l’abbaye d’Aindre, la Vita Hermelandi contient de constantes références au vin, qui est consommé dans le récit dans des proportions considérables ! Donat, qui éprouvait sans doute une affection particulière pour ce breuvage, fait de son héros un adepte de la diplomatie du verre partagé, il souhaite peut-être bien l’utiliser comme promoteur des productions viticoles de sa communauté.
[45]Cap. 26. Évènement non autrement localisé, alors que le narrateur indique habituellement une géographie exacte. On peut en déduire qu’il se rattache au même environnement que les deux paragraphes précédents.
[46] L. Musset, « Le monachisme sur le territoire normand avant la fondation du duché, aperçus et hypothèses », Art de Basse-Normandie, n° 77, printemps 1979 ; Thomas Jarry, « Les débuts du Christianisme dans l'ouest de la Normandie », Annales de Normandie, 48ᵉ année, n° 2, 1998, p. 115-149.
[47] Charles Meriaux, « Thérouanne et son diocèse jusqu’à la fin de l’époque carolingienne : les étapes de la christianisation d’après les sources écrites », Bibliothèque de l’École des chartes, t. II, 2000, p. 377-406.
[50] Leur tradition remonte pour le moins au IVe siècle de notre ère, avec les fondations orientales de saint Pacôme et de Basile de Césarée, abritant des communautés féminines et masculines, qui occupaient chacune une berge opposée du fleuve. En Gaule au VIIe siècle, ce schéma d’implantation caractérise encore le monastère féminin d’Hamage et son parèdre masculin de Marchiennes (Nord-Pas-de-Calais), fondés vers 630 de part et d’autre de la Scarpe (Étienne Louis, « Wandignies-Hamage, abbaye de Hamage », ADLFI. Archéologie de la France - Informations, Nord-Pas-de-Calais, mis en ligne le 1er mars 1997).
[51] Monastère situé in confinio Bajocensis et Constantiensis Neustriae inferioris civitatum, versus mare oceanum selon le martyrologe français de du Saussay. Sur le culte de saint Marcouf, cf. Pierre Flobert, « Saint Marcouf, de Childebert à Charles X », in Corona monastica, moines bretons de Landévennec, Mélanges offerts au père Marc Simon, Rennes, PUR, 2004, p. 37-42 ; Charles Grosset, « Hypothèse sur l'évangélisation du Cotentin. IV Saint Marcouf », Revue de la Manche, fasc. 82, avril 1979, p. 39-69.
[52] J. Deshayes, « L’église paroissiale de Saint-Marcouf et l’histoire de l’abbaye de Nantus », Vikland, n° 22, 2017, p. 36-50. Comme nous tentons de l’établir dans cet article, et ainsi que l’avait déjà suggéré Arcisse de Caumont, il est probable que la crypte romane de l’église actuelle de Saint-Marcouf (ancien canton de Montebourg), totalement disproportionnée, reprenne l’assise de l’apsis édifiée au VIIe siècle pour accueillir le corps du saint. Contrairement à ce qu’affirme un peu rapidement P. Flobert (« Saint Marcouf…, loc. cit., p. 40), il n’est donc pas si assuré que le monastère de Nantus ne soit « évidemment plus reconnaissable sur le terrain », ni moins encore qu’il ait été simplement bâti en « chaume, bois et torchis ».
[53] Paul Fouracre, Richard A. Gerberding, Late Merovingian France, History and Hagiography(640-720), New York, Manchester University Press, 1996, 1996, p. 133.
[54] L. Musset, « Ce qu’enseigne l’histoire d’un patrimoine monastique : Saint-Ouen de Rouen du IXe au XIe siècle », in Aspects de la société et de l'économie dans la Normandie médiévale (Xe-XIIIe siècle), Caen, 1988(Cahier des Annales de Normandie, 22), p. 115. Site non localisé (Catteville ?).
[55] M. P. Marchegay, « Chartes normandes… », loc. cit. p. 664-666 : Has casas, ipsas res, in pago Constantino, in condeda Quasnacinse, cujus vocabulum est Regnacum, Venmagnacum, Molacum, Martiniacum, Bonno, Cornacum, cum omnis apendiciis eorum.
[56] L’un des paragraphes de sa vita souligne la relation amicale qui unissait Hermeland et l’abbé Maurontus du Mont-Glonne, décédé v. 695 cf. B. Judic, « Quelques réflexions … », loc. cit., p. 508.
[57]L’interpolation à la vie de saint Ansbert par le moine Aigrard de Fontenelle (Acta Sanctorum, III, p. 575) précise qu’après la mort d’Hermeland, l’abbaye de Fontenelle continua de choisir parmi ses frères les « recteurs » de l’abbaye d’Aindre.
[58] Donation par Raginfridus, v. 743/744, d’une portion du domaine de Lestre (portionem aliquam de uilla quae dicitur Laxtra). Chronique des abbés de Fontenelle, éd. Pascal Pradié, Paris, Les Belles Lettres, 1999, p. 92.
[59]Chanoine Pigeon, « Vies des saints du diocèse de Coutances et Avranches », Mémoires de la Société archéologique du Cotentin, t. XI, 1895, p. 115-125 ; Toustain de Billy, Histoire des évêques de Coutances, Rouen, Soc de l’histoire de Normandie, t. I, éd. F. Dolbet, 1874, p. 56. L’église de Saint-Fromond a abrité une collégiale privée au début du XIe siècle, puis un prieuré de l’abbaye de Cerisy-la-Forêt sous Guillaume le Conquérant. Cf. L. Musset, « Les origines du prieuré de Saint-Fromond : un acte négligé de Richard II », B.S.A.N., t. LIII, 1955-1956 (1957), p. 475-488.
[60]Son corps fut transféré à Fécamp, puis à Rouen, à la fin du IXe siècle. Cf. Jacques Le Maho, « L’installation des moines de Saint-Fromond (vers 889-890), un grand exode monastique à la fin du IXe siècle », in De l’histoire à la légende, la broderie du précieux sang, Fécamp, 2001, p. 17-24
[61] Maylis Baylé, « Sainteny, église Saint-Pierre », in L’architecture normande au Moyen-âge, Condé-sur-Noireau, Corlet, t. II, 1997, p. 208 ; Marc Thibout, « L’église Saint-Pierre de Sainteny », Congrès archéologique de France, CXXIVe session, « Cotentin et Avranchin », 1966, p. 235
[62] Élément connu à ce jour par un unique cliché, provenant des archives personnelles du professeur Lucien Musset et portant au verso : « Sainteny (Manche), église, sculptures romanes, cl. M. Lelégard ». Le relief à décor d’entrelacs carolingien y figure au décor d’un autre bloc sculpté montrant un ange et paraissant dater du XVe siècle.
[63]François Delahaye, « Portbail, le baptistère », Bilan scientifique, DRAC Basse-Normandie, service régional de l’archéologie, 1998, p. 66-67.
[64] À Gatteville, plusieurs sarcophages mérovingiens (VIe-VIIe siècles) ont été exhumés en 1968 sur la place qui sépare aujourd’hui l’église Saint-Pierre de la chapelle Notre-Dame. Il est tentant d’établir un lien entre ce site très singulier et les traditions hagiographiques, malheureusement tardives, se rapportant à saint Romphaire, successeur de saint Lô à l’évêché de Coutances, censé avoir fondé un ermitage à Barfleur, paroisse voisine issue d’un démembrement de Gatteville. Concernant Vesly, la première mention référencée à cette paroisse est contenue dans une charte de donation concédée vers 1022-1026 par le duc Richard II au profit de l’abbaye du Mont-Saint-Michel, comprenant la terram etiam Durandi, que est intra terminos ville que nuncupatur Verlei (M. Fauroux, « Recueil… », loc. cit., n° 49, p. 161). Le fait que ce bien figure parmi un lot conséquent de « restitutions », comprenant de façon évidente d’anciennes propriétés monastiques délaissées durant la période des incursions scandinaves, constitue un autre indice potentiel de passé monastique. À ces indices s’ajoute l’attestation, en plus de la chapelle Notre-Dame toujours existante, qui contient une quantité impressionnante de fragments de sarcophages du haut Moyen Âge, deux autres chapelles vouées à sainte Walburge et à saint Aubin. Tout près se trouve aussi le site de l’ancienne chapelle Sainte-Opportune de Lessay. Une épigraphie du VIIIe siècle a en outre été retrouvée sur le site.
[65] C. Duclos, L. Jeanne, L. Le Gaillard, L. Paez-Rezende, J. Deshayes, « Agglomération secondaire de Montaigu-le-Brisette, prospection inventaire 2003 », Revue de la Manche, t. 47, fasc. 190, oct. 2005, p. 45-47.
[66] J. Deshayes, « Le prieuré Saint-Michel du mont de Vauville », Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu'île de la Hague, n° 10, 2016, p. 37-44.
[67] J. Deshayes, « La chapelle du prieuré Sainte-Marguerite à Saint-Germain-le-Gaillard », Bulletin du groupe de recherches archéologiques du Cotentin, n° 11, janvier 2004, p. 58-61.
[68] J. Deshayes, « Brix, prieuré Saint-Pierre de la Luthumière », Vikland, n° 25, 2018, p. 23-32.
[69] J. Deshayes, « Sainteny, un site de production de sarcophages au haut Moyen-âge », Vikland, n° 30, 2019, p. 56-59.
[70] L. d’Achery, J. Mabillon, « Vita Audomari episcopi Tarvennensis », Acta Sanctorum, 1669, p. 559.
[71] Charles Guerard, « Cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin », Collection des cartulaires de France, t. III, 1840, p. 21.
[72]M. P. Marchegay, « Chartes normandes… », loc. cit.
[73] J. Deshayes, « Les origines de Saint-Floscel et le Mont-Castre de Montebourg », Vikland, n° 24, 2018, p. 6-9 ; « Brix, de l’éperon protohistorique au château médiéval », Vikland, n° 25, 2018, p. 10-18.
[74]Cap. 17 : ut nulla domintio alicuius potestatis monachis in eo constitutis aliquam inquietudinem ingere praesumeret.
[75] Le catalogue des évêques de Coutances cite Salomon puis Agatheus après l'évêque Fromond, attesté v. 680. Jean-Pierre Brunctec’h, « Le Duché du Maine et la marche de Bretagne », in Helmut Atsma (dir.), La Neustrie, les pays au nord de la Loire, de 650 à 850, Sigmaringen, Thorbecke Verlag (Beihefte der Francia, 16/1), 1989, t. I, p. 41.
[76] A. Chédeville et H. Guillotel, La Bretagne …, op. cit., p. 58 ; J.-P. Brunterc’h, « Le duché du Maine … », loc .cit., p.41.
[77]La donation de 867 de Charles le Chauve à Salomon de Bretagne, comprenant toutes les abbatiae du Cotentin, marque l’étape ultime de leur annexion par le pouvoir carolingien.
Le travail en cours de Christophe ROUIL pour un programme d'illustrations destinées à la création de tables d'interprétation du patrimoine, sur le territoire du Pays d'art et d'histoire du Clos du Cotentin. Ici : Colomby.
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